samedi 23 avril 2011

Le Voyage insolite (émission du 18 avril)


Note : Il s'agit de la dernière émission de la saison. Frédérick et moi serons de retour en ondes au cours du mois de septembre.


Les portes de l’ombre, de Gilles Vidal

Les portes de l’ombre, de Gilles Vidal, est le 43e numéro de la série Coups de tête. Ce roman se présente comme un thriller. D’emblée, sa couverture m’a interpellée, puisqu’elle représente un bas-relief sur lequel sont sculptés des démons. Avec mon intérêt pour le diable et les récits qui le mettent en scène, je ne pouvais pas résister à parcourir ce livre, dans lequel les forces du mal sont omniprésentes.

Je ne connaissais pas Gilles Vidal auparavant, même si l’auteur français a signé une trentaine de livres à travers les années. Son écriture est décrite comme très personnelle, entre journal intime et fiction sociale. J’étais donc heureuse de le découvrir avec ce livre, dont le résumé me semblait prometteur.

Le récit démarre en effet par une situation des plus attrayantes : une épidémie de meurtres, de suicides et d’accidents suspects survient brusquement, ne visant que les grands criminels. La police, plus précisément l’inspecteur Berchet, se charge de cette enquête singulière, qui semble porter le sceau du surnaturel. Il obtiendra par la suite l’aide de Ludmilla, une agente immobilière, dont il tombera rapidement amoureux. Autour de lui gravitent aussi ses collègues policiers, dont son adjoint Samir Hadji, sans oublier la médium Mathilde, qui éprouve des visions liées à l’étrange épidémie.

L’inspecteur Berchet ira ainsi de surprises en surprises, autour de cette intrigue à saveur surnaturelle, qui le mènera sur une piste imprévisible. Car il est toujours risqué de frayer avec les forces du mal, peu importent les formes qu’elles peuvent prendre…

Avec Les portes de l’ombre, Gilles Vidal propose donc un bon thriller, traversé par des passages gores assez audacieux. Malheureusement, la façon de décrire ces scènes ne fonctionne pas toujours, échouant parfois à susciter chez le lecteur les réactions horrifiques escomptées. Par contre, l’une des forces de l’auteur est sans contredit son talent à dépeindre la psychologie des personnages, surtout celle de son héros, l’inspecteur Berchet. Ce dernier est en effet à des lieux de l’image du policier aigri que véhiculent certains thrillers. Au contraire, Berchet est sensible et vit pleinement son amour pour Ludmilla. Ce choix vient par conséquent donner un caractère humain bien intéressant à l’enquête, en permettant à la fois de s’intéresser à l’intrigue et aux protagonistes.

De plus, l’écriture des Portes de l’ombre est fluide et agréable, parfois ponctuée de passages plus écrits. Seul le dernier chapitre échappe à cette règle, nous présentant rapidement, et en vrac, les destins de tous les personnages. D’ailleurs, le roman aurait à mon avis gagné à posséder une cinquantaine de pages de plus, afin de donner davantage d’ampleur au dénouement.

Quoi qu’il en soit, Les portes de l’ombre est un thriller bien fait, avec une prémisse originale et des personnages attachants. Le mélange entre thriller et surnaturel m’a également plu. Ce Coups de tête est donc à ne pas manquer pour les adeptes du genre, qui y trouveront certainement leur compte.


Les jardins naissent, de Jean-Euphèle Milcé

Les jardins naissent, de Jean-Euphèle Milcé vient de paraître chez Coups de tête, presque en même temps que Les portes de l’ombre. C’est la première fois que l’auteur haïtien collabore à la collection. Auparavant, il avait écrit une dizaine de livres, dont deux romans en français publiés chez Bernard Campiche éditeur. Il a également publié des ouvrages en créole, et plusieurs de ses titres ont été traduits dans diverses langues. Il ne s'agit donc pas le coup d’essai de Milcé, un auteur qui s’intéresse beaucoup aux thèmes de l’exil et de la traversée.

Les jardins naissent est un livre bref, semblable au format habituel des Coups de tête, qui se lisent en plus ou moins une heure. L’histoire est séparée en nombreux chapitres, servis par une écriture personnelle, ponctuée par endroits de phrases très courtes. Ce procédé donne d’ailleurs au livre une certaine poésie, qui vient enrichir la trame narrative.

Nous nous retrouvons ainsi dans les décombres de Port-au-Prince, que parcourt Marianne, une jeune Française qui y effectue de l’aide humanitaire. Bien vite, Marianne fera la rencontre de Daniel, un ancien réfugié. Ils noueront des liens d’amitié au centre de détention de la ville, avant de se revoir plusieurs fois par la suite. Mais, dans le contexte précaire qu’est celui de Port-au-Prince, les travailleurs du Comité international de la Croix-Rouge ne peuvent se mouvoir à leur guise. Marianne se fera donc surprendre en flagrant délit, avant d’être punie pour son incartade. Ensuite, la jeune femme visitera Port-au-Prince sous un œil différent, à présent qu’elle ne peut plus se consacrer à l’aide humanitaire. Elle sera ainsi mise au fait d’un projet particulier : celui de faire pousser des denrées comestibles parmi les ruines…

Avec ce livre, Milcé offre une vision touchante de Port-au-Prince, qu’il connaît visiblement très bien. La ville est soigneusement décrite dans ce court roman, par l’entremise du personnage de Marianne, assez attachant. Toutefois, l’ensemble n’a pas ce caractère intense et incisif des habituels Coups de tête. Au contraire, le récit m’a semblé par moment un peu tiède, voire manquer d’intensité, souffrant d’une certaine retenue.

Néanmoins, si vous appréciez Port-au-Prince et que vous avez envie de vous plonger dans un récit plus « printanier », comme le laisse présager la couverture, qui représente un plan en train de germer, Les jardins naissent est une lecture à retenir. Après tout, l’auteur maîtrise bien l’écriture et le roman bref, et gagne à être découvert.

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